Dans les cabinets dentaires, le malaise augmente face aux patients infectés par la rage
- Depuis plusieurs années, les chirurgiens-dentistes et leurs équipes sont confrontés à une augmentation des violences et des incivilités.
- Cela est notamment dû à la pénurie de dentistes qui touche de nombreuses régions.
- Face à cette lutte, l’Union Dentaire lance des formations pour aider les professionnels à gérer leur stress et à désamorcer certaines situations.
Cela a pris du temps mais elle a désormais réussi à tourner la page. En juin 2021, une assistante d’une clinique dentaire de la région de Saint-Brieuc (Côte d’Armor) a été victime d’une violente agression. Incapable de trouver une place chez le dentiste et souhaitant être vu de toute urgence, un homme a fait irruption dans le cabinet ce jour-là avec colère. La jeune femme raconte : « J’ai eu une dispute avec mon collègue. » Puis je suis intervenu et il m’a griffé, a arraché mes lunettes et m’a craché dessus. »
« Profond mal-être dans la profession »
Une nouvelle accumulée qui inquiète la profession qui, comme tous les agents du système de santé, est confrontée à une montée des violences ces dernières années. « Personne n’en parlait avant, mais les chirurgiens-dentistes et leurs équipes souffrent beaucoup et il y a un profond mal-être dans la profession », confirme le Dr Janig Brocher, dentiste à Saint-Brieuc et vice-président de l’Association dentaire.
En plus de vingt ans de carrière, le professionnel avoue n’avoir jamais subi d’agression physique. Mais au fil des années, elle a vu la colère et la violence s’infiltrer dans son bureau. «Mes assistants doivent supporter des attaques verbales», dit-elle. Nous avions aussi un patient qui voulait tout détruire, mais j’ai pu gérer la situation parce que je le connaissais. »
Une pénurie de dentistes dans de nombreuses régions
Cette augmentation de l’agressivité et de l’impolitesse s’explique en grande partie par la pénurie de dentistes qui touche de nombreux domaines. Ce problème n’est pas nouveau mais s’est aggravé ces dernières années avec de nombreux départs à la retraite qui n’ont pas été remplacés. Le fait que Covid ait fermé les cabinets pendant trois mois n’a pas non plus aidé, allongeant ainsi les temps d’attente. De nombreux dentistes se retrouvent contraints de refuser de nouveaux patients en raison des exigences élevées. « Nous avons des personnes en détresse au téléphone et c’est difficile de leur dire qu’on ne peut pas les recevoir », reconnaît l’assistante de la victime de l’attentat.
Après plusieurs appels, certains patients mécontents décident de venir directement au cabinet. « On leur a expliqué qu’on faisait vraiment de notre mieux mais certains ne veulent pas comprendre », souligne le chirurgien-dentiste péritonéal qui souhaite garder l’anonymat. Pour éviter les agressions, elle a décidé il y a deux ans d’installer un interphone dans la cour de son bureau. « C’est dommage que nous soyons arrivés jusqu’ici », admet-elle, « mais nous devons nous protéger. »
Formation gestion du stress
Face à cette insécurité généralisée, l’Association dentaire tente de réagir. Jeudi à Rennes, le syndicat a organisé sa première formation sur le thème de la gestion du stress et de la communication non violente. «Je leur apprends à développer leur écoute en essayant de comprendre les besoins de la personne en face d’eux», explique la formatrice Beatrix Bedtino. Car pour réduire les tensions, il faut réellement pouvoir entendre la colère même si ce n’est pas toujours la solution. »
À la demande d’autres spécialistes, l’Union Dentaire doit renouveler les formations dans toute la France dans les prochains mois. Parallèlement, le syndicat a également lancé une campagne d’affichage dans les salles d’attente chirurgicales pour informer les patients des risques auxquels ils seraient exposés en cas d’agression.